Après un encore meurtre retentissant, le média de tout le monde est enthousiasmé et enchanté, en savourant toute goutte de sang. Les philistins plats en marchent sur les pas, avec les forums et les arrière-cours remplis de petits détails où petits avis, de remarques à propos et hors de propos. On se demande : à quoi bon ? Pas de sornettes, s'il vous plaît ! Racontez de votre liberté d'expression à quelqu'un autre. Quand on est commandé de se taire, on se taira. Sinon, il y a toujours quelque chose à couper ; par exemple, on peut, bien opportunément, périr dans un acte terroriste bien simulé, et il ne restera que se désoler pour ne pas être parvenu à le détourner... Avez-vous jamais vu ces bonnes comédies, avec Pierre Richard ?
Une conjecture logique : la terreur n'est qu'une sorte de publicité. Celle fort efficace et avantageuse, il faut admettre : avec dépenses minimales, on touche toute l'humanité. Le reste est bien entendu : toute publicité présume un client, il y a des agences publicitaires, et le menu fretin, l'exécuteur immédiat. En un sens, les réseautages sociaux (les chats, les blogs) sont initialement conçus comme un outil de cette publicité, un renforçateur officiellement permis des rumeurs. Le bavassage de salon, c'est bien moins de chose que tout l'Internet bouleversé. Bon, l'affaire ne vaut pas tripette pour ceux qui préfèrent mieux d'être assassinés en France que vivre en Russie. Mais qui va leur prêter l'oreille ? Ils sont à égorger sans bruit, dans la coulisse.
La terreur a ces racines objectives et subjectives. D'un côté, dans les conditions de l'absolutisme démocratique (c'est à dire, la dominance totale d'une seule superpuissance rapace), il n'y a pratiquement pas d'autres moyens pour se maintenir à flot : si votre loi est contre nous, nous avons de bon droit à arroser cette loi de votre sang. D'autre part, quel chef tel cuisine : si le grand maître américain peut légalement exterminer un million des asiatiques innocentes, pourquoi un asiatique ne pourrait pas tuer quelques européens (et même américains, avec un peu de la chance) mal protégés ? La violence est cultivé d'en haut comme un moyen essentiel du règlement des litiges, donc l'humanité ne sais pas d'autres, plus raisonnables. Faut-il s'étonner que tout appel à violence trouve facilement une réponse pratique ? Le sol est déjà bien fertilisé. Et les bouts des fils sont toujours dans les mains du client, du sponsor, de l'organisateur. Tout le monde le connait. Mais ce qui parle, va se taire pour toujours. C'est ça qui est le but principal de la terreur : les gens doivent savoir, les gens doivent craindre.
Bien sûr, lutter contre des manifestations sans lutter contre la cause, ça dépasse les bornes de la sottise naïve pour devenir une partie d'une campagne publicitaire de grande échelle. On ne fera disparaître le terrorisme avant qu'on écarte son base économique, le système social où les uns puissent faire leur fortune à dépense des autres. Aujourd'hui, un ouvrier ne touche pas le salaire qu'il digne ; demain, on va, avec conscience immaculée, déchaîner la guerre et tuer tous ceux à qui on doit ; et puis, les tueurs forcés perdent toute apparence humaine et se misent à assassiner n'importe qui (à ce point, on peut bien leur diriger).
Par une opportunité purement théorétique, pourquoi pas couper toute publicité à titre de combattre le terrorisme globale ? Pendant une guerre, c'est une pratique habituelle de contrôler les médias pour ne pas publier des informations qui ne donneraient pas des avantages opérationnelles. La lutte contre le terrorisme est comme toute autre, et on pourrait recourir à la même tactique. Défendez de mauvaises nouvelles aux folliculaires ; envoyez au poteau tous les disséminateurs de rumeurs (l'Internet y compris). Quand on ne lit dans la presse que des bandits liquidés, quel sens aurait-il de s'engager au banditisme ? Quand même, personne ne va ni savoir ni apprécier. Donc personne n'aura peur. Quelle sorte de terreur serait-il ?
On employait, en son temps, une tactique pareille à l'Union Soviétique, et cela s'est montré bien efficace en lutte contre le banditisme et la terreur contre-révolutionnaire (malgré tout l'appui par les patrons présents du monde). Le socialisme n'a été vaincu par force ; il a perdu la cause dès le moment quand on a renié le communisme, en remettant les issues de la distribution du bien public à la discrétion du marché et donc reconstituant la base économique de l'inégalité sociale.
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